lundi 10 novembre 2014

Comment le Sénat français trafique les textes du Suédois Simon Häggström

Aujourd’hui, je reproduis presque intégralement le texte de Gérard Biard dans le journal Charlie Hebdo (le site internet de Charlie Hebo est ICI...) du 29 oct. 2014. J’ai mis certains passages en gras ou en couleur... c’est important de SAVOIR que sous un apparent désintéressement, les machos du Sénat travaillent bel et bien à la continuité du système prostitutionnel ! Et tout ça bien payé avec nos euros !

«Bidouillages au Sénat» (extrait de Charlie Hebdo du 29 oct. 2014)

«... Si le projet de loi sur la lutte contre la prostitution, adopté depuis bientôt un an par l’Assemblée nationale, n’a toujours pas été inscrit à l’ordre du jour, cela ne signifie pas pour autant que les sénateurs s’en désintéressent. En juillet dernier, la commission spéciale sur la lutte contre le système prostitutionnel avait d’ailleurs fait sauter la mesure la plus emblématique, la pénalisation du client (...) Et si l’on a la curiosité d’aller consulter les documents relatifs aux travaux de ladite commission sur le site du Sénat, on découvre qu’ils ont parfois donné lieu à une intéressante activité de réécriture.


Penchons-nous sur l’audition de l’inspecteur Simon Häggström, chef de la brigade antiprostitution de Stockholm, venu témoigner des résultats, 15 ans après l’adoption de la loi criminalisant l’achat de services sexuels, de ce fameux «modèle suédois» qui, au dire des défenseurs du libre marché aux esclaves, «ne fonctionne pas». Lui est venu expliquer, expérience à l’appui, qu’au contraire il fonctionne, et que «la traite et la prostitution ne sont plus un problème en Suède aujourd’hui». Affirmation pour le moins capitale dans le débat, mais qui, si elle est évidemment présente dans l’enregistrement de son intervention (vidéo ici) a disparu du compte rendu écrit (texte ici) destiné à servir de document de travail à tous les sénateurs quand la loi sera débattue en séance. Et ce n’est pas le seul élément de son témoignage ayant subi des modifications (...)


Simon Häggström souligne d’abord que cette loi est «l’outil le plus précieux» pour lutter contre la prostitution et les réseaux de proxénétisme. Dans le compte rendu, la loi devient «le principal outil», ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

Puis il dément, par les faits, plusieurs arguments des opposants à la pénalisation.

Concernant l’objection selon laquelle il serait impossible de prouver la réalité du délit, Simon Häggström témoigne que «8 clients sur 10 admettent le crime immédiatement sur les lieux de l’arrestation, sans même que nous ayons eu à les conduire au poste de police». Ce qui devient à l’écrit : «Le client peut reconnaître les faits, ce qui arrive dans la plupart des cas.»
Plus loin, il répond à la critique classique : la loi conduira les clients vers d’autres pays. «C’est en partie vrai, admet-il, car 70% des clients disent que leur achat précédent s’est fait dans un autre pays. Mais c’est la preuve que la loi marche parce que les Suédois n’osent pas acheter du sexe en Suède. C’est pour cela qu’il faut que plus de pays adoptent cette législation ou une législation similaire.» Une démonstration absente du compte rendu, qui lui fait dire : «Les clients déclarent à 70% que leur précédent achat de services sexuels avait eu lieu à l’étranger, mais cela ne doit pas dissuader un pays d’agir comme il lui semble juste.»

Quant à l’inévitable débat sur la sécurité des prostituées, que la loi compromettrait, Simon Häggström est formel : «Les femmes prostituées disent que la Suède est un pays plus sûr que les autres. Beaucoup ont vendu du sexe avant dans d’autres pays européens et elles disent que les clients suédois qui viennent les voir [...] savent [...] que s’ils se conduisent mal la femme peut appeler la police sans être punie, sans encourir aucune pénalité.» Information qui devient : «La Suède passe pour un pays plus sûr pour les femmes prostituées [...]». Le témoignage direct des principales concernées se transforme en vague réputation, qu’on invite à mettre en doute...
 
Certes, l’intention de faciliter la tâche des sénateurs en les guidant dans leur vote est louable. Mais est-elle vraiment compatible avec les règles démocratiques ?"
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Un article de Zeromacho en parle aussi ICI avec tous les liens !... En anglais / here in English "French Senate: falsified testimony about prostitution"...